LSF – Loi de Sécurité Financière
Cet articule est extrait de notre livre « L’audit de Fraude et la délinquance financière » Edition Emerit Publishing.
Après les Etats-Unis et le désormais célèbre « Sarbanes-Oxley Act » du 30 juillet 2002, La France a adopté le 1er Août 2003 la loi n° 2003-706, dite « Loi de Sécurité Financière ».
Selon les autorités françaises, la Loi de Sécurité Financière (LSF) se veut, « une réponse à la fois politique et technique à la crise de confiance dans les mécanismes du marché et aux insuffisances de régulation dont le monde économique et financier a pris connaissance » à la suite des divers scandales financiers et de l’effondrement de grandes entreprises multinationales.
La Loi de Sécurité Financière (LSF) a pour objectifs :
- - une réduction des sources de conflits d’intérêts ;
- - un renforcement des obligations d’information ;
- - un renforcement du contrôle interne.
Réduction des sources de conflits d’intérêts
Conflits d’intérêts concernant les commissaires aux comptes
La LSF a mis fin à de multiples conflits d’intérêts dans le commissariat aux comptes. Parmi les principales mesures adoptées, on trouve :
- - le renforcement des garanties d’indépendance des commissaires aux comptes en précisant les incompatibilités objectives et subjectives relatives à leur statut ;
- - la distinction entre les activités d’audit et celles du conseil. La LSF a interdit au commissaire aux comptes « de fournir à la personne qui l’a chargé de certifier ses comptes, ou aux personnes qui la contrôlent ou qui sont contrôlées par celle-ci (…) tout conseil ou toute autre prestation de services n’entrant pas dans les diligences directement liées à la mission de commissaire aux comptes (…) ». Cette interdiction a été étendue au réseau national et international du commissaire aux comptes ;
- - la rotation des commissaires aux comptes signataires qui ne peuvent certifier durant plus de six exercices consécutifs les comptes des personnes et entités dont les titres financiers sont admis à la négociation sur un marché réglementé.
Conflits d’intérêts et gouvernance d’entreprise
S’inscrivant dans la démarche de réduction des sources de conflits d’intérêts et de l’amélioration de la gouvernance d’entreprise, la LSF a apporté des modifications à quelques dispositifs issus de la loi NRE. Ainsi :
- - concernant le cumul des mandats : la LSF a levé le doute sur la question traitant du cas où un Directeur Général exerçait aussi un mandat d’administrateur dans des filiales. Aujourd’hui, l’article L.225-94-1 prévoit que l’exercice de la Direction Générale par un administrateur est décompté pour un seul mandat ;
- - concernant les conventions réglementées : le seuil de détention de droit de vote exigeant de soumettre au Conseil d’Administration les conventions réglementées conclues entre la société et un actionnaire passe de 5 à 10% (article L225-38 du Code de commerce);
- - concernant les conventions libres : les difficultés constatées dans la pratique ont conduit à un assouplissement du dispositif. Désormais, l’article L225-39 du Code de commerce indique que les conventions courantes qui, en raison de leurs implications financières ne sont significatives pour aucune des parties, échappent à l’obligation de communication au Conseil d’Administration ;
- - concernant la rémunération des mandataires sociaux : l’obligation imposée par la loi NRE, applicable aux Sociétés Anonymes, de publier annuellement le montant des rémunérations de chaque mandataire social a été considérée par beaucoup comme manifestement excessive. La LSF (article 225-102-1 du Code de commerce) a corrigé cette disposition. Désormais, l’établissement du rapport annuel détaillant le montant des rémunérations de chaque mandataire social n’est obligatoire que dans les Sociétés Anonymes cotées ou (non cotées mais contrôlées par une société cotée) ;
Renforcement des obligations d’information
La LSF prolonge les efforts de la loi NRE de 2001 en multipliant les obligations d’information. Ces obligations ont pour objectif d’instituer une transparence financière afin de protéger les intérêts des épargnants et des investisseurs. Parmi les principales mesures adoptées, on peut citer :
Institution de nouvelles obligations d’information pour le Président du Conseil d’Administration et du Conseil de Surveillance
Ces obligations sont instituées par :
- - l’article L225-37, qui traite les Sociétés Anonymes disposant d’un Conseil d’Administration et d’une Direction Générale ;
- - l’article L225-68, qui traite les Sociétés Anonymes disposant d’un Conseil de Surveillance et d’un Directoire.
Observations des commissaires aux comptes sur les procédures de contrôle interne et de gestion des risques qui sont relatives à l’élaboration et au traitement de l’information comptable et financière
La Loi de Sécurité Financière a institué de nouvelles obligations pour le commissaire aux comptes. En effet, l’article L225-235 du Code de commerce, issu d’ailleurs de la LSF, stipule que : « Les commissaires aux comptes présentent, dans un rapport joint au rapport mentionné au deuxième alinéa de l’article L.225-100, leurs observations sur le rapport mentionné, selon le cas, à l’article L.225-37 ou à l’article L.225-68 (Voir les articles ci-dessus), pour celles des procédures de contrôle interne et de gestion des risques qui sont relatives à l’élaboration et au traitement de l’information comptable et financière. Ils attestent l’établissement des autres informations requises aux articles L. 225-37 et L. 225-68 ».
Le rapport mentionné au deuxième alinéa de l’article L.225-100 est le rapport du Conseil d’Administration ou du directoire présenté à l’assemblée.
Ces obligations ont été traduites dans les Normes d’Exercice Professionnel, notamment la NEP-9505 « Rapport du commissaire aux comptes établi en application des articles L.225-235 et L.226-10-1 du Code de commerce sur le rapport du Président », qui précise que :
- - « Le Commissaire aux comptes vérifie que les informations, autres que celles portant sur les procédures de contrôle interne et de gestion des risques qui sont relatives à l’élaboration et au traitement de l’information comptable et financière, requises aux articles L.225-37, L225-68 et L226-10-1 du Code de Commerce, figurent dans le rapport du président. Si tel n’est pas le cas, il s’entretient avec le président à l’effet d’obtenir les compléments qu’il estime nécessaires. A défaut d’obtenir ces compléments, il signale dans son rapport l’irrégularité constituée par l’absence de certaines de ces informations » (NEP-9505-10°).
- - « Le commissaire aux comptes n’a pas à vérifier la sincérité des informations autres que celles portant sur les procédures de contrôle interne et de gestion des risques qui sont relatives à l’élaboration et au traitement de l’information comptable et financière….. » (La NEP-9505-11°).
Renforcement du contrôle interne
Comme précisé ci-dessus, la Loi de Sécurité Financière a imposé au Président du Conseil d’Administration et du Conseil de Surveillance de rendre compte, dans un rapport joint au rapport de gestion annuel, des procédures de contrôle interne et de gestion des risques mises en place par la société, en détaillant notamment celles de ces procédures qui sont relatives à l’élaboration et au traitement de l’information comptable et financière pour les comptes sociaux et, le cas échéant, pour les comptes consolidés.
Un contrôle interne au sens large
La LSF opère donc une distinction entre le contrôle interne d’une société en général et le contrôle interne relatif à l’élaboration et au traitement de l’information comptable et financière. Il s’agit là d’une différence majeure avec la loi Sarbanes-Oxley (SOX) qui ne s’intéresse qu’au volet comptable et financier. La rédaction du rapport sur le contrôle interne implique, en conséquence, une analyse de la gestion des risques de l’entreprise à tous les niveaux (risques opérationnels, risques stratégiques, risques comptables et financiers, …).
Un contrôle interne avec des limites
Appliquée à l’origine à l’ensemble des SA, l’obligation d’établir ce rapport a été ensuite limitée, par la « Loi pour la Confiance et la Modernisation de l’Economie » (Loi Breton de juillet 2005), aux seules Sociétés Anonymes faisant appel public à l’épargne. Il s’agit ici d’une première restriction à la transparence dans les Sociétés Anonymes.
Contrairement au « Turnbull guidance » britannique et au fameux COSO américain, la France ne dispose pas d’un référentiel unanimement admis en matière de contrôle interne. Dans son rapport 2004 sur le gouvernement d’entreprise et le contrôle interne, l’Autorité des Marchés Financiers (AMF) note « qu’à la différence de la gouvernance d’entreprise, qui bénéficie désormais de ‘standards de place’ auxquels les émetteurs peuvent se comparer, l’absence d’un référentiel unanimement admis sur le contrôle interne en rend la description plus difficile et peut constituer un frein si l’on souhaite parvenir à terme à une évaluation de l’adéquation et de l’efficacité des systèmes ».
Il convient de préciser que la LSF a été inspirée de la loi américaine Sarbanes-Oxley Act, expliquée ci-dessous.
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